Cœur sous haute surveillance

Apnée. Plexus sidéré et incapacité à me distancier de mes obsédantes pensées.

L’écriture, comme écran de projection, comme mise à distance de mon aveuglement.

Célibataire épanouie, nouvelle injonction new age, donnant l’autorisation d’expérimenter une nouvelle relation.

Découragement, dépit et accablement d’abord dans le « se sentir seule », dont l’accommodation prend une forme sinusoïdale.

Sentiment d’inaptitude, ensuite, à créer un lien (sain) avec un homme (sain) sans prière ni pensée magique.

Impensée, inespérée, la rencontre réelle est écartée des possibles et  laisse place à la « femme-songe », cœur ouvert, cœur mâture et en joie, sans crainte de trahison, de rupture, de non amour, à la « femme-rêve » que rien ne bride, sans handicaps non assumés, aux parler et mouvements du corps naturellement fluides.

Porter le deuil, de cette femme-songe, de cette femme-rêve, et plus tard, accueillir la femme-réelle, dénuée et dénudée de gloire.

La femme-réelle dont l’aspiration secrète est une querelle d’amour pour se sentir vibrante, vivante.

Cheminer dans l’abstinence et dans le célibat c’est me résigner à être écho de l’injonction au bien-vivre bien-être seule. Non ! J’ai assez « abstiné ». Je veux expérimenter.

Accepter d’être ordinaire parmi d’autres êtres plus ou moins ordinaires. Qui juge de l’extra-ordinaire de l’existence ? Et si en l’ordinaire de l’existence l’être s’épanouissait ?

Renoncer à être une femme spéciale, à sortir du lot pour gagner le « gros lot ». Renoncer à être remarquée pour des dons qui n’existent pas. Renoncer à accomplir en grandes pompes ses rêves d’enfant : faire vivre la paix dans le monde.

Accomplir la paix dans mon foyer, dans mon cœur. Eh ! Tous ses habitants ! Premier pas d’un long voyage : me reconnaître. Ma dimension réelle, ma carrure véritable bornée par mes limitations dans l’espace et dans le temps, bornée par mes handicaps physiques et psychiques. La paix dans mon foyer, cohabiter …

Retour sur l’état de mon cœur.

Il s’est amouraché. Signe d’un renouveau.

Accueillir – sans déserter mon cœur – la déception, le chagrin qui l’habite d’expérimenter à nouveau le non-amour.

Accueillir – sans déserter mon cœur – la douleur physique du resserrement des tissus qui l’entourent.

Accueillir – sans déserter mon cœur – sa susceptibilité aux moindres variations émotionnelles. Et l’aimer toujours.

L’aimer mon cœur, de se manifester, timide ou paré de tendresse, de douceur, de mépris aussi lorsqu’il veut cacher sa véritable nature : un cœur pudique, émerveillé et sans cesse renouvelé dans le sentiment amoureux.

Quelle épreuve douloureuse et sans cesse renouvelée de n’être pas lové dans un autre cœur semblable à lui pour se sentir chéri.

Eux, père et mère, ont réussi l’exploit de confier leur cœur l’un à l’autre.

Eux, père et mère, malgré la violence et les limitations, se sont fait confiance, s’autorisant l’amour réciproque. S’autorisant l’Amour !

Pourquoi moi non ? Retour au rêve d’enfant. La paix dans le monde.

Un amour belliqueux est-il non-conforme ? Qui peut juger ce qu’est vraiment l’amour ? L’amour ravage parfois ce qui l’entoure. L’amour anti-militariste en quête d’un amour pro-paix trouvant racine dans un trop-plein d’amour belliqueux.

Brutalité de mes histoires de cœur en syntonie avec la brutalité de mon histoire d’amour parentale. Choisir de stagner dans la peur d’être à nouveau blessée ? Accueillir le fait d’avoir peur. Accueillir qu’étant donné les faits il est normal d’avoir peur. Souvenir du premier pas. Souvenir de l’état d’extase, et ce malgré la brutalité des chutes, que j’ai maintes fois touchées – à travers mes expériences, particulièrement amoureuses.

Pas suivant, il est temps. Saute à nouveau dans cet espace inconnu et pars à la rencontre de l’ange de l’extase !

Mais avant, que veut partager ton cœur ?

Mon petit cœur était fou amoureux de celui d’un homme, qui l’a maltraité. L’histoire parentale qui remonte à la surface … pour être nettoyée. Je me suis fâchée contre mon petit cœur d’avoir été si dupe, lui infligeant une seconde raclée en le méprisant et le condamnant d’avoir été si « mal »-amoureux. Masochisme. Comment, après tant d’humiliations, pourrait-il aujourd’hui oser s’ouvrir à l’amour ? La crainte d’être maltraité parce qu’il est aimant est pesante. Autant rester caché …

Mon petit cœur est sur le qui-vive pour éviter de tomber amoureux, et quand malgré toute sa vigilance, cela arrive, il devient logiquement très méfiant – de façon maladive – de l’homme dont le cœur lui plaît. Il se repli, pétrifié, limitant ses battements et le risque d’un nouvel échec amoureux qui lui vaudrait humiliations et condamnations de la part de la femme qu’il habite et qui le tient sous haute surveillance.

Je voudrai lui simplifier la vie à mon petit cœur. Qu’il puisse battre à son rythme, se sentir libre d’être à nouveau aimant, sans honte de prendre le risque d’aimer, d’être aimé ou rejeté.

Lui demander pardon d’avoir balayé la souffrance d’une rupture marquée par la violence et par la perversion.

Lui demander pardon d’avoir dénié la souffrance, en miroir amplifié, de mon propre rejet.

Mon cœur tu es beau paré de tendresse et enveloppé d’amour.